Séminaire et exposition - Les Silences : Témoignages du trauma colonial algérien
Cet événement s’articule autour de deux temps forts comprenant une programmation artistique et un après-midi de séminaire transdisciplinaire. L’occasion de confronter autour des usages archivistiques du silence, les nouvelles approches contemporaines de la recherche-création, de l’anthropologie, de la philosophie et de l’histoire.
Récurrence constante dans l’expression du traumatisme, le silence de la personne traumatisée donne lieu à un silence dans le témoignage, qui dessine à son tour un paradigme du silence autour d’une mémoire intransmissible. Ce serait aller vite que de laisser à l’appréciation générale cette dimension silencieuse sans la mettre profondément en question. Effectivement le silence, pour autant qu’il met en défaut la représentation et l’interprétation logique, n’est jamais une absence de son ou d’expression. Pouvant être enregistré, conservé et écouté, le silence constitue un témoignage précieux de l’irreprésentable, qui s’oppose à la preuve écrite et renverse le statut de l’évidence documentaire. La typicité de ces silences se fait entendre dans les archives orales, dès lors que l’on prête attention aux modalités du souffle et du ton aux abords des arrêts abruptes ou abouliques de la voix, de tout ce qui vient déréguler la parole par persistance d’un manque d’articulation. L’expression de ce silence peut également être étudiée par voie indirecte, dans les processus d’invisibilisation historique. Dans le cas de la colonisation on peut ajouter que la silenciation est un outil à part entière du processus colonial, en tant que celui-ci a besoin de rendre secrets les actes violents et destructeurs garants de sa puissance actuelle et, à court terme, future. La matérialité et les représentations symboliques des silences en lien avec la mémoire du trauma colonial algérien forment aujourd’hui un enjeu expérimental, dont les artistes, les chercheur.euse.s et les artistes-chercheur.euse.s s’emparent, pour questionner et faire résonner différemment l’histoire. Qu’écouter alors du silence de la personnes blessée et comment l’écouter ? Comment parler de la blessure collective et comment la rendre sensible au sein du discours académique et de la création ? Pour répondre à ces questions trois axes sont proposés. Un temps d’exposition comprenant l’installation sonore Haraka de l’artiste-chercheur Jérémie Nicolas, la pièce électroacoustique Immemorial echoes de l’artiste-chercheuse Sara Lehad, et le film de la psychanalyste Sophie Mendelsohn An/harkie ; un temps dédié à la recherche-création animé par Karima Dirèche et Véronique Ginouvès, avec deux communications des artistes-chercheur.euse.s Sara Lehad et Jérémie Nicolas autour de leurs créations respectives ; et une table ronde animée par Giulia Fabbiano avec les chercheuses Amandine Peyraud-Mamys, Chloé Sausserau et Inès Atek. L’organisation de cet événement a lieu dans le cadre du projet « Les harkis et le trauma colonial algérien : Faire entendre les silences de voix », faisant suite à un appel à projet 2022-2023 de la MSH Paris-Nord, regroupant trois structures du réseau : la MSH Paris-Nord, la MMSH et la MSH Sud, autour de la valorisation de l’installation sonore Haraka de l’artiste-chercheur Jérémie Nicolas en région PACA et Occitanie, notamment en décembre au Mémorial du Camp de Rivesaltes.
Contact(s) : Estelle Bernard : estelle.BERNARD@univ-amu.fr